Avant de donner des trucs de débutant, qu’est ce que j’entends par photo de paysage. Généralement, c’est une photo qui a pour sujet la nature, sans présence humaine. Dans un style classique, on y retrouve des vues épiques et un point de vue large.
Mais il pourrait très bien contenir quelques homo sapiens. Un personnage minuscule dans un paysage énorme étant un raccourci facile pour montrer l’échelle de la scène. Attention de ne pas toujours faire cette photo par contre, vous courrez le risque de devenir une vedette Instagram.

La photo de paysage s’est également élargie pour inclure des interprétations de l’échelle de la transformation humaine sur son territoire. L’impact de l’homme sur la nature et les conséquences. Edward Burtynsky étant un exemple extraordinaire de ce type de travail.
Maintenant que l’on à couvert qu’est-ce qu’est de la photo de paysage, comment avoir de meilleurs résultats?
Je vous propose de regarder quelques notions quant à la technique, l’équipement et la créativité. Ce sera un survol dans le contexte de cet article, mais autant que possible, je vais élaborer ces idées dans d’autres articles.

Doit-on avoir accès à un endroit époustouflant pour faire des photos de paysage?
Je suis déchiré sur cette question. J’habite une île paradisiaque, alors si je fais 10 min de route j’ai des vues superbes.
Je pense que le danger réside dans la tentation de toujours se dire que nos photos seraient meilleures si seulement on se rendait à Fiji ou en Islande.
Il suffit d’explorer son propre entourage pour en ressortir la beauté. Le vrai défi sera d’apprivoiser la lumière et comment l’interpréter.

Il me semble même contre productif quand je regarde les itinéraires de safaris-photos qui font l’entièreté du Maroc ou de l’Italie en 10 jours. Mon île fait 100km de long et en 10 ans je n’ai pas fini de l’explorer. Courir pour prendre la photo carte postale de chaque endroit ne développe aucunement l’oeil ou le talent. Plus perso, j’offre des safaris sur mon île. Les détails complètement pas à jour quant aux dates (écrire un blogue et avoir deux jobs c’est du temps) sont visibles ici: http://www.nigelquinnphoto.com/fr/safaris-photo
L’équipement habituel pour de la photo de paysage
Plus on se spécialise dans un type de photo, plus l’équipement jouera un rôle déterminant dans la qualité POTENTIELLE de l’image. Même si je n’encourage pas activement aveuglement acheter le meilleur équipement, il a sa place. Je n’ai pas strictement besoin d’un objectif 85mm et de l’éclairage studio pour réaliser un bon portrait, mais cela me simplifie la tâche énormément.
En photographie de paysage, l’incontournable c’est le trépied. Si vous comprenez bien la profondeur de champ, vous savez que si on utilise une petite ouverture afin de ne pas avoir de flou, on doit sacrifier soit dans l’ISO ou dans la vitesse pour compenser pour la perte de lumière créée. De préférence, on veut une photo de paysage avec le moins de perte de détail possible, alors un ISO assez bas. Le trépied nous permet de stabiliser la caméra durant le temps de pose.
Tant que le trépied est solide (alors aux vidanges les trépieds à 50$, vous finirez un jour avec une caméra brisée) et qu’il ne vente pas trop, le temps de pose plus long ne devrait pas introduire de flou de mouvement dans votre photo.
Attention, si vous avez un sujet en mouvement, celui-ci sera flou si le temps de pose est trop lent pour geler son action. Cela peut créer un bel effet par contre si c’est intentionnel. Les photos avec de la mer en avant-plan sont propices à laisser des temps de pose de plusieurs secondes.

Donc, le seul variable du triangle d’exposition restant est la vitesse. Si vous travaillez aux extrémités de la journée, la lumière est belle, mais pas particulièrement brillante. Sa puissance s’affaiblissant, il faut alors plus de temps pour exposer une photo si on garde un ISO bas et le diaphragme refermé. Les capteurs récents ont de meilleures sensibilités ISO et le sacrifice en qualité serait plus modeste, mais je recommande tout de même utiliser un trépied.

La photo de paysage classique utilise des objectifs qui tirent vers le grand-angle, disons entre 17mm et 35mm ou l’équivalent pour des plus petits capteurs. Si vous avez un boîtier avec un capteur de format APS-C (faites une recherche Google pour votre modèle) l’équivalent sera plus proche de 10mm à 24mm. Si vous ne comprenez pas entièrement ce que je viens de dire, pour aujourd’hui ce n’est pas important. Le principal est de ce concentrer sur des questions plus générales.
Plus votre chiffre en mm sera bas, plus vous voyez large 😉 Vous êtes en train d’étirer la perspective. Donc la distance que l’on perçoit entre des objets sera plus grande. Pensez à votre miroir de voiture. C’est un miroir grand-angle et c’est écrit dessus que les choses sont plus proches qu’elles le semblent. À l’inverse, si je prends un téléobjectif à 200mm, il y a une compression des plans.
L’avantage principal d’utiliser un objectif grand-angle pour la photographie de paysage c’est que l’on voit plus de notre paysage. Cela exagère également l’ampleur des nuages dans le ciel. Le danger est de ne pas placer un sujet proche dans notre avant-plan. Sans quoi, la photo peut sembler trop vide.

Il existe d’autre équipement utile pour pousser plus loin la photo de paysage, des filtres polarisants et de densité neutre, un déclencheur, etc. Mais, cela dépasse le niveau débutant et je ne voudrais pas que l’équipement prenne le dessus sur des concepts plus importants.
Quelques trucs de composition
Plus important que la technique et l’équipement sera comment vous agencez vos éléments dans votre cadre. La composition est probablement le sujet le plus complexe dans notre art et je soupçonne dans tous les arts. Les débutants sont toujours conseillés d’appliquer la règle des tiers. C’est un bon point de départ pour se questionner sur comment interpréter nos sujets.
Certains amateurs avancés vont le prêchés aveuglément d’une manière uniforme sans discernement quant au contexte dans lequel cette Règle est appliquée. Bref, je ne suis pas un grand défenseur de ce raccourci. Se limiter à ce seul concept de composition est un handicap. Ce serait comme apprendre qu’en cuisine le truc c’est de mettre du sel. Mais sa goûte bon, alors les gens continuent de l’appliquer. Je l’intègre régulièrement dans mon travail, mais en conjonction avec d’autres principes.
Je vais bientôt commencer à écrire de courts articles sur des notions de composition et je compte même monter un petit court gratuit sur le sujet. Selon ma charge de travail, probablement au courant de l’été. Néanmoins je vais présenter deux principes rapidement.
La règle des tiers en photo de paysage
La règle des tiers demeure incontournable. Sa popularité s’explique par sa simplicité. Il suffit de séparer votre cadre en tiers verticalement et horizontalement. Comme suit:

Ensuite, idéalement pour le paysage on remplirait 2/3 de la partie horizontale soit de ciel, soit de sol afin de montrer qu’il y a en un qui est plus important. Des points bonis si on peut placer un sujet important sur les points de convergence des lignes (les points verts dans mon exemple)
L’intérêt de cette règle est qu’en évitant de placer un sujet ou un horizon en plein milieu du cadre, cela crée une légère tension qui permet à l’oeil de se promener dans le cadre.

Mais la symétrie peut donner le résultat désiré dans plusieurs cas, alors ne vous limitez pas à cette formule. Surtout lorsqu’il y a des reflets.
L’espace négatif
L’espace négatif est mon point de départ une fois que j’ai identifié mon sujet. Le concept est un peu plus avancé que la règle des tiers. Cela demande une intention plus ciblée et adaptée au contexte.
L’espace négatif est à son plus simple tout ce qui se trouve dans votre cadre qui n’est pas un sujet ET qui ne distrait pas de votre sujet. Généralement, ce qui se prête le mieux à cet usage est une surface relativement uniforme, ayant peu de contraste ou de texture. Des exemples pourraient être un ciel vide, une mer calme, un champ verdoyant.
L’idée est que si j’ai identifié un endroit simple et uniforme, cela m’offre en quelque sorte une toile blanche sur lequel placer un sujet. Si mon ciel est rempli de nuages dramatiques ou la mer est pleine de moutons, les deux contenant tant de contraste et de textures, il serait difficile de faire ressortir un sujet placer sur ces surfaces. Regardons quelques exemples pour comprendre l’intention.

Ici, si je veux voir mes quenouilles dorées, il faut un arrière-plan plus foncé sur lequel les placer. Je ne peux pas intervenir beaucoup pour affecter mon arrière-plan, changer ma position était limité. Mais je pouvais attendre un peu que le soleil baisse suffisamment pour qu’il commence a y avoir une ombre projeter par terre, MAIS pas encore si basse que les quenouilles tombaient également dans l’ombre. Cette situation durait quelques minutes au plus. Mais en sachant que mon intention était de mettre en valeur ce sujet, j’ai anticipé et attendu patiemment. Si mon avant-plan était aussi illuminé que l’herbe que l’on voit au loin, les quenouilles seraient camouflées en ton sur ton.

L’intérêt de l’espace négatif est que si on considère que notre sujet doit être remarqué en premier par le spectateur, on voudra alors identifier les propriétés de celui-ci et tenter de les placer sur un espace négatif avec les propriétés inverses. Alors du pâle sur du foncer, une couleur chaude sur du froid, monochrome sur du saturé, texturé sur du lisse et j’en passe. La beauté du concept est que c’est un casse-tête infini.
Si mon ciel est vide et que je n’ai pas de sujet sur celui-ci, est-ce que je dois lui réserver un tiers de mon cadre. Je peux probablement mieux utiliser cette zone.

L’état d’esprit pour prendre de la photo de paysage
Patience. Un des grands avantages de travailler avec trépied est que l’on ralentit le rythme de notre travail. Si le processus prend plus de temps, on à moins le réflexe de photographier beaucoup de prises différentes sans trop se soucier de l’ensemble du cadre.
Si vous voyez un sujet qui vous semble intéressant, mais qu’il manque un élément, peut-être que le ciel est dénudé de nuages ou la lumière ne l’éclaire pas, ayez le réflexe d’évaluer la situation. Est-ce que si vous restez sur place pour quelques minutes, les étoiles vont s’aligner pour avoir la photo que vous anticipez. La photo de paysage c’est trop souvent comme prendre un vol international. Dépêchez-vous pour attendre! Et l’envol passe en un coup de vent. Vivre aux Iles me donne un avantage important là-dessus. Avec des vents de 80km+ les nuages se renouvellent rapidement.

Suivez la (mauvaise) météo

En photo de paysage, même si la caméra ne bouge pas, la scène elle peut être en constante mutation. Si la couverture nuageuse change, la forme du paysage tracée par les rayons de soleil parsemés auront un impact drastique sur la photo.

Les photos les plus intéressantes sont souvent provoquées par la transition entre le beau et le mauvais temps. Je me rappelle d’une croisière sur laquelle j’étais dans le fjord du Saguenay et il y avait une brume incessante. Les autres passagers étaient déçus. C’était Noël pour moi.

Profitez de la belle lumière

En photo de paysage, surtout si vous cherchez le style classique, la clé du succès sera d’utiliser la lumière aux extrémités de la journée. L’heure dorée comme on l’appelle. Lorsque le soleil est bas dans le ciel, sa couleur tirera vers des tons chauds. Lisez sur la balance des blancs si cela vous fait froncer les sourcils.
En bonus, puisque les rayons doivent passer à travers plus de couches de l’atmosphère, ils perdent de la puissance. Cela à pour effet de diminuer le contraste dans notre cadre. Les caméras ont toujours eu de la difficulté à bien enregistrer les extrêmes de contraste (il vous est déjà arrivé de photographier un paysage et avoir un ciel tout blanc?) alors cette baisse de contraste aide énormément à maintenir du détail. Si vous photographiez à contre-jour par contre, vous aurez de la surexposition dans le ciel ou de la sous-exposition au sol. Votre histogramme vous donnera des indices par rapport à ces problèmes.
De plus, une lumière qui arrive de côté (si vous vous placez perpendiculaire au soleil) est généralement flatteuse. Ce type de lumière met en valeur la forme, puisque l’on se retrouve avec une partie du sujet éclairée et une partie qui tombe dans l’ombre. On comprend donc son volume.

Pour profiter de l’occasion, il suffit de sortir faire de la photo de paysage au coucher de soleil. On me dit que c’est très joli au lever de soleil également, mais puisque je dois me motiver avec du bacon post-séance et que j’aimerais développer un 6-pack plutôt qu’un keg, mon médecin m’a prescrit de rester couché.
Cette superbe lumière ne dure pas très longtemps, alors il est préférable de préparer votre séance.
Le repérage
Lorsque possible, je vous recommande de visiter l’endroit que vous comptez poser avant la séance. Question de vous familiariser avec le potentiel visuel, d’anticiper vos cadrages et de noter la position du soleil à l’heure que vous y serez. J’utilise l’application Sun Seeker sur mon téléphone pour vérifier la direction du soleil à l’heure où j’y serai.
Nous aurons seulement effleuré les notions de base de la photo de paysage aujourd’hui. Mais c’est le principe d’une introduction. Nous pourrons élaborer et développer ces idées dans d’autres articles. D’ici là, je vous encourage à aller vous amuser dans la nature. C’est si thérapeutique, avec ou sans bonnes photos.
Et un dernier truc, ayez toujours des mitaines au proche!

En extra, voici quelques-uns de mes coups de coeur pour la photo de paysage:
Josef Hoflehner, paysage urbain noir et blanc en longue exposition, high key. Michael Kenna dans la même tendance, mais plus sombre.
Edward Burtynsky comme j’ai mentionné plus tôt.
Marc Adamus pour un style actuel qui utilise une forme de HDR que je peux tolérer, les masques de luminosité.
Guy Tal talent génial pour la texture et des cadres plus serrés.
Charlie Waite pour du traditionnel classique.
Ansel Adams comme père de cette école de photo.
Comme toujours, chers photographes, je vous dis à la prochaine!
Et n’oubliez pas de partager l’article, merci!
Nigel